Le corps enseignant a vendu son âme… et pour pas cher.
Combien ? Quelques heures sup : 2, 3… 4 au maximum, le tout défiscalisé bien sûr (c’est-à-dire non imposable). Ceux qui se sont bien gavés du message démago de monsieur Sarkosy me demanderont peut-être où est le mal à vouloir travailler plus pour gagner plus ? Observons donc ce qui se passe à l’éducation nationale :
Le gouvernement a ouvert une brèche il y a deux ou trois ans, quand il a mis en place le remplacement ponctuel entre collègues pour supprimer les remplaçants … La méfiance fut d’abord de rigueur, puis sur la base du volontariat, payé en HSE (heure supplémentaire effective à 36,88 € brut pour un certifié et 52,32 € brut au tarif agrégé), certains se sont laissés tentés et ont commencé à courir après les sous…
Devant un tel engouement pour les heures sup, dans des soucis d’augmentation du chômage, avec une bonne politique de droite, le gouvernement a réellement dégraissé le mammouth… certains en ont parlé et d’autres le font : ils ont supprimé 11200 postes pour cette belle rentrée, ce qui a automatiquement pour effet d’augmenter les effectifs des classes évidemment (28 élève par les classe de collège, 35 en seconde) et d’augmenter le nombre d’heures des profs (2 HSA (heure supplémentaires annuelles) par prof en moyenne + 1,2 millions d’HSE)*. Les heures étant défiscalisées, une partie des profs est volontaire … et cerise sur le gâteau, Sarkosy offre une prime de 500 euros aux profs qui feront 3 heures sup annuelles pour récompenser ceux qui courent après les dollars. A savoir tout de même que ceux-ci se situent généralement plus dans les les lycées que dans les collèges, et dans les centre villes plus que dans les établissements classés ZEP.
Et qu’est-ce que ça change ?
Oh, presque rien… Certains courent après l’argent dans un métier où la motivation était autre il y a encore peu de temps, pendant que d’autres revendiquent encore le partage du temps de travail. Car on rappellera que 6 heures sup, c’est un tiers de poste qui disparaît. (Certes le maximum légal est encore de 4 HSA, mais il n’est pas scrupuleusement respecté, de plus, on peut légalement cumuler 4 HSA avec 2 HSE par semaine à l’année). Se côtoient donc des profs à 22 heures (+HSE éventuelles) qui gagnent environ 2200 € brut par mois (pour un certifié au 3 ème échelon, c’est-à-dire 2 ans d’ancienneté ) avec d’autres enseignants à 18 heures et 1800 € brut au 3 ème échelon. C’est donc bien le statut du prof qui s’effrite par là-même. On rappellera d’ailleurs que les heures sup sont évidemment accordées à telle où telle personne au bon vouloir du principal, lui-même en concurrence avec le collège ou lycée voisin, puisque dorénavant, les parents peuvent souvent choisir l’établissement de leur enfant. Nous voici donc dans une éducation nationale prête à être privatisée. "Qui veut des actions ENF (Éducation Nationale Française ) pas cher, bonne qualité ! " ou même par collège et lycée : "actions Louis-le-Grand à vendre… mise en bourse 400 €, ou sinon lycée Edouard Herriot à 15 €". On peut aussi imaginer un partenariat avec des privés, comme en Angleterre : "tu vas au collège Coca ou au collège Quick ? " Et pourquoi pas non plus une petite réforme, non pas sur le statut de tous les profs, mais simplement sur les nouveaux arrivants : " Ils pourraient faire 21 ou 22 heures par semaine au lieu de 18… puisque certains peuvent déjà le faire… " ; "oui, au salaire de base évidemment " ou encore des remplacements ponctuels obligatoires pour tous … "payés ou pas ?" … à l’appréciation du chef d’établissement en fonction des HSE qu’il aura à sa disposition.
Et qui descendra dans la rue ? Les profs aux 4 heures sup.? les contractuels qui bouchent les trous ? ou les assistants d’éducation ? (nouveau nom et nouveau statut pour surveillant) recrutés par le principal pour des contrats précaires de 6 ou 10 mois pas toujours renouvelables.
Et le projet de suppressions de 13500 postes en 2009 n’arrangera certainement pas la situation.
* à savoir que les heures supplémentaires des profs (quelque soit leur nature : HSA ou HSE)sont moins payées que les heures du service normal, ce qui intéresse donc le gouvernement : payer des profs en heures sup revient nettement moins cher que d’embaucher un nouveau prof.
Une arme de révolutionnaire en charentaise made in Education Nationale, peut d’ailleurs être de refuser la deuxième HSA (une seule HSA pouvant nous être imposée ) et de convaincre les collègues de faire de même. Ci-joint une lettre type de refus (source : syndicat enseignant)